Voici, pour mémoire, le message québécois cité par Christian Montelle:
Wow ses vraiment simbolique dans une vie de tout voir ses chause extra-ordinaire que la nature et lumanité galactique peut observer avec passion ques les eclips, je suis presentement entrain de regarder ce merveuilleux spectacle,,,
Et Christian d'ajouter :
Comme disait mon prof de français : "Le principal, c'est qu'on se comprend ! "
Je pense qu'il importe de réfléchir un peu à cette boutade du prof de français.

A la lecture du texte québécois, on est tenté de répondre par l'affirmative à la question :
"est-on gêné par une erreur d'orthographe?" : il faut se donner beaucoup de mal pour entrer dans la pensée de ce monsieur !

Pourtant, en classe, on va faire comme si cela n'avait d'importance que pour la note de la production. Cela m'étonnera toujours...
Comment, si l'on agit avec les élèves en leur faisant croire que l'on comprend un tel message sans difficulté (et on le fait à peu près partout !), pourra-ton ensuite justifier la nécessité de respecter l'orthographe?
Et, de fait, c'est bien là que le bât blesse. Puisqu'on se comprend, à quoi peuvent servir les fameuses règles de M. Bled ??

Depuis que je travaille sur cette question et que j'observe les élèves dans les classes, j'ai acquis la conviction que la cause n°1 des difficultés d'orthographe, loin d'être la prétendue complication de son organisation, n'est autre que l'impression confirmée et reconfirmée qu'elle n'a aucune utilité, sauf à rendre la vie des élèves impossible.
Certes, lorsque l'on commence à entrer dans l'écrit au CP, avec des phrases de manuels dépourvue de toute marque orthographique, autre que celles qui traduisent la prononciation, lorsque jamais ne sont éclairées les difficultés liées aux erreurs orthographiques (y compris celles qui concernent la ponctuation), lorsque les enfants voient que l'enseignant comprend toujours très bien ce qui est écrit et ne tonitrue que pour le principe, on comprend aisément que les élèves puissent interpréter l'orthographe comme une sorte de torture sadique, liée à l'écriture, qui rend odieuse cette dernière, et explique les compétences plus que médiocres des adultes dans ce domaine.

Dans le travail de recherche-action que j'ai mené dans les classes sur l'enseignement de l'orthographe, notre hypothèse a été de commencer par un travail sur les rôles de l'orthographe en lecture, bien avant de s'en préoccuper en écriture.
Ce qui, concrètement, impliquait deux modifications des comportements de l'enseignant en classe :
1- utiliser, pour l'enseignement de la lecture, des messages impliquant que soient prises en compte les marques orthographiques, notamment sur les homophones : Pour peser les pois, apporte-moi les poids ; ou ce bel exemple trouvé dans la Presse ce matin : Pour dénoncer, il suffit aujourd'hui d'énoncer... etc.
2- Toujours réagir aux erreurs d'orthographe, en termes de compréhension, et non en termes de "fautes".
Cela signifie dire aux élèves :
"Tu as écrit un mot qui n'est pas français : tu ne le trouveras pas dans le dictionnaire. Donc on ne peut pas te comprendre...",
ou bien : "Le mot que tu as écrit ici a telle signification et je ne vois pas ce que ça vient faire dans ton texte"
ou encore "En français, il est impossible que ton verbe ait cette terminaison avec ces mots-là comme sujet"
— au besoin, en ajoutant : "je crois deviner ce que tu as voulu dire, c'est parce que je te connais un peu (et que je suis payé pour ça !!) : mais n'importe qui d'autre ne comprendra rien !!"

Et de fait, en parlant ainsi, on ne fait que reproduire ce qui se passe dans la vie normale de tout adulte lecteur. Les exemples qui le prouvent sont innombrables. En voici un, parmi mille autres.
Un jour (lointain) s'étalait à la Une de France-Soir le titre suivant: Allon à Paris.
Trouvé dans une copie d'élèves, le mot "allon" aurait été souligné deux fois et sanctionné. Mais à la Une d'un journal, aucun lecteur ne suppose une erreur d'orthographe. Comme le mot "allon" n'existe pas en français, l'hypothèse adoptée alors est que le mot doit être un nom propre. Deux possibilités se présentent alors :
1- le lecteur connaît ce monsieur, et tout va bien.
2- le lecteur ne le connaît pas, et il s'informe ou il considère qu'il en sait assez...

C'est ainsi que l'orthographe est interprétée dans les lectures de la vie. C'est donc ainsi qu'elle doit l'être dans l'école.
Ce que je peux affirmer — sans prétendre prouver quoi que ce soit ! — c'est que nous avons observé un profond changement de comportement en écriture, de la part des élèves. Le doute orthographique s'est installé en eux, et comme parallèlement, nous mettions en place, outre le travail d'enseignement du fonctionnement de l'orthographe française, une énorme travail d'entraînement à la maîtrise de la recherche dans les dictionnaires (y compris ceux de conjugaison), nous avons alors observé une libération très nette de la production d'écrits.
Résultat constamment observé, chaque année, dans toutes les classes avec lesquelles nous avons travaillé.

Ça ne devrait pas coûter bien cher d'essayer... C'est ce que je dis à tous mes collègues éplorés devant les productions de leurs élèves.

Lorsque les élèves comprennent à quoi sert ce qu'on leur demande et qu'ils ont les moyens de répondre efficacement, le respect des règles n'a plus à être imposé : il va de soi.
Qu'on se le dise : il me semble que c'est un peu oublié aujourd'hui...!