Enseigner le français avec Eveline Charmeux.

Quelques citations à retenir...

« Le simple n’existe pas. Il n’y a que du simplifié. Le réel reste toujours plus complexe que n’importe quelle théorie et les faits sont têtus. » Gaston BACHELARD

« Bien penser, c’est appréhender ensemble le texte et le contexte, l’être et son environnement, le local et le global, le multidimensionnel, bref le complexe.
Progresser dans la connaissance, ce n’est pas aller du simple au complexe, mais de la complexité vers toujours plus de complexité. La connaissance est une navigation dans un océan d’incertitudes à travers des archipels de certitudes.
L’éducation doit promouvoir une intelligence générale apte à se référer au complexe, au contexte de façon multidimensionnelle et au global. Plus puissante est l’intelligence générale, plus grande est la faculté de traiter des problèmes spéciaux.
L’intelligence parcellaire, compartimentée, mécaniste, disjonctive, réductionniste, brise la complexité du monde en fragments disjoints, fractionne les problèmes, sépare ce qui est relié, unidimensionnalise le multidimensionnel. C’est une intelligence myope qui finit souvent par être aveugle. L’intelligence aveugle rend inconscient et irresponsable.»
Edgar MORIN

« Toutes les méthodes de lecture proposent des séquences idéalisées de progression accumulative qui vont du simple au complexe, du facile au difficile, à partir d’une définition du simple et du facile faite « de l’extérieur », sans remettre en question le fait qu’elles peuvent ne pas correspondre à ce qui est difficile ou complexe pour l’enfant…
Les séquences pédagogiques présentent les lettres, les syllabes, les mots dans un certain ordre, en doses préparées en laboratoire, égales pour tous ; on ne permet pas à l’enfant « d’écouter de la langue écrite » jusqu’à ce que lui-même puisse lire ; la langue écrite lui est présentée hors de tout contexte (le maître ne lit pas pour s’informer ou pour informer les enfants mais « pour apprendre à lire aux enfants », même chose pour les activités de lecture des enfants ; il n’écrit pas pour communiquer ou pour conserver de l’information, mais pour « apprendre à écrire aux enfants »)….
Toutes les méthodes pénalisent l’erreur, car elles estiment qu’on apprend seulement par la reproduction correcte et qu’il ne faut pas essayer d’écrire ou de lire si on n’est pas capable de le faire sans fautes. Conséquence inévitable : les enfants n’essayent plus ni de lire, ni d’écrire et de ce fait n’apprennent pas. »
Emilia FERREIRO

" Les hommes d’ancien régime dans l’enseignement primaire sont un peu surpris de ce que nous entreprenons ; ils sont même un peu choqués ! Mais, disent-ils, est-ce que, autrefois, avec les anciennes méthodes, avec le programme restreint à lire, à écrire et à compter, on ne faisait pas des élèves sachant bien lire, écrivant correctement, comptant à merveille, comptant et écrivant peut-être mieux que ceux d’aujourd’hui, au bout d’un an ou deux d’école ? Cela est possible ; il se peut que l’éducation que nous voulons donner dès la petite classe nuise un peu à ce que j’appelais tout à l’heure la discipline mécanique de l’esprit. Oui, il est possible qu’au bout d’un an ou deux, nos petits enfants soient un peu moins familiers avec certaines difficultés de lecture ; seulement, entre eux et les autres, il y a cette différence : c’est que ceux qui sont plus forts sur le mécanisme ne comprennent rien à ce qu’ils lisent, tandis que les nôtres comprennent. Voilà l’esprit de nos réformes "
(Discours de Jules FERRY au congrès pédagogique des instituteurs du 19 avril 1881).

« Aucun savoir ne peut se confondre avec la possession d’un catalogue d’éléments simples auquel on adjoint une combinatoire en guise de mode d’emploi… Tout se passe pour l’école comme si le simple était facile et le complexe difficile. Le jeune enfant doit donc aborder, non la réalité complexe, mais les éléments qui la constituent. Plus il empilera d’éléments simples, plus il s’élèvera dans la complexité. »
Jean FOUCAMBERT (L’enfant, le maître et la lecture)

« Une erreur répétée dix fois, cent fois, mille fois devient vérité quand elle est proférée par des officiels, par des institutions. Un mensonge pieux passe alors pour une certitude définitive. »
Michel ONFRAY (Les sagesses antiques)

« Les pédagogies les plus prometteuses, que défendent souvent les institutions de formation, exigent en général des enseignants un goût de la communication, du risque, de l'improvisation, de la coopération, de l'expérimentation, voire de l'aventure didactique qui ne font pas partie du profil de base des gens qui s'orientent vers l'enseignement. Les enseignants sont généralement d'anciens bons élèves plutôt que des innovateurs, des entrepreneurs, des chercheurs. Un peu plus de réalisme amènerait à voir que l'essentiel du travail de formation est de susciter l'adhésion de principe et le développement personnel avant d'instrumenter. Ainsi, pour organiser la communication en classe, ce n'est pas de compétences linguistiques que les enseignants ont d'abord besoin, c'est d'aisance et de plaisir dans la mise en place et l'animation de telles situations…»
Philippe PERRENOUD (La formation des enseignants entre théorie et pratique)

« On étudie sous le nom de belles lettres, deux langues mortes qui ne sont utiles qu’à un tout petit nombre…sous le nom de rhétorique on enseigne l’art de parler avant de penser et celui de bien dire avant d’avoir des idées. »
Jacques DIDEROT

« On ne peut par résoudre un problème sans changer l’état d’esprit qui l’a engendré. »
Albert EINSTEIN

« En segmentant les savoirs pour les rendre progressifs et accessibles, on risque de leur faire perdre toute attractivité : autant un problème complexe peut stimuler la curiosité et déclencher une recherche, autant l’acquisition, palier par palier, de « bases », dont on n’entrevoit aucune utilisation future peut décourager, voire dissuader durablement… Autant la joie de comprendre « comment ça marche » peut réconcilier avec les savoirs, autant l’acharnement sur des procédures abstraites peut écarter pour longtemps tout espoir de trouver un plaisir intellectuel à l’école… »
Philippe MEIRIEU

« Quand je suis dans l’autobus, je m’amuse, comme chacun fait, à lire les réclames collées sur le verre et qui se montrent à l’envers ; je suis alors semblable à un illettré ; car je reconnais aisément chaque lettre, mais l’ensemble du mot m’est tout à fait étranger. J’épelle, mais je n’ai jamais cette perception instantanée qui me permet de reconnaître un mot comme on reconnaît un visage. Et si j’avais coutume d’examiner un visage par parties, le menton, le nez, les yeux, jamais je ne reconnaîtrais un visage. Au reste, si la règle de nos pensées était d’aller du détail à l’ensemble, nous ne penserions jamais rien, car tout détail se divise, et cela sans fin. L’esprit d’ensemble, c’est l’esprit. Ainsi, il se peut bien qu’épeler soit un très mauvais départ… »
ALAIN

Apprendre à « avoir des idées » et à « bien penser », avant de « bien dire » et de « bien parler. Car, ce n’est pas de misère grammaticale en translation sur le fil morphosyntaxique(ou ailleurs !) que souffrent les écoliers français, mais de la pauvreté pédagogique de leurs profs.
En effet, « on ne peut par résoudre un problème sans changer l’état d’esprit qui l’a engendré.» On ne le répétera jamais trop.  Laurent Carle.