Première affirmation :
Je pense que l'on ne peut faire l'économie du répétitif, que le sens vient peu à peu.

La répétition, nécessaire aux apprentissages ?
Qu'il faille répéter pour que les élèves apprennent, on est bien d'accord.
Mais toute la question, c'est ce qu'on entend par le verbe "répéter". S'agit-il de redire et redire la même chose, x fois ? Mais alors, on est dans le conditionnement, le dressage. Or, même pour les animaux, les dresseurs contestent cette manière de faire...
Il faut savoir que le problème de la répétition en matière d'apprentissage, a été fort bien analysé et défini de façon quasi définitive par les travaux de l'équipe de Daniel Coste, qui en a même dégagé une loi presque mathématique, mettant en évidence, à partir de l'opposition savoir actif / savoir passif :
1- la nécessité de reprises nombreuses, sous des formes et dans des contextes différents, de la même information, qui permettent l'installation de l'information dans le savoir passif, où, certes, elle ne peut pas être utilisée, mais qui constitue une étape incontournable de l'apprentissage.
Tout ce qu'on apprend commence par séjourner dans ce qu'on appelle le savoir passif, zone de mise en attente de nos savoirs : on peut les reconnaître si on les rencontre, mais on ne les a pas suffisamment digérés pour pouvoir les utiliser.
2- la nécessité d'intervalles d'oublis de cette information, intervalles qui doivent être de durées progressives, entre les reprises, pour que l'information passe du savoir passif dans le savoir actif. et qu'elle puisse ainsi être utilisée.
Une des tâches du travail d'enseignement consiste à agir sur ce passage. Et c'est pour cela qu'il ne peut s'agir d'une simple "transmission".
Ces constats, confirmés tous les jours par l'expérience personnelle de chacun d'entre nous, éclairent l'erreur manifeste de la démarche habituelle : leçon —> mémorisation —> récitation.
Je ne peux réciter qu'un savoir tiré de mon "savoir actif".
Si la leçon de l'enseignant a été pour moi la première rencontre avec le savoir expliqué, il m'est impossible de réciter quoi que ce soit à son sujet.
Vous me direz : "il y en a qui sont pourtant capables de le faire !". Oui, ce sont ceux qui ont déjà eu l'occasion, par la richesse de leur environnement familial, d'en faire la rencontre. Où l'on a une preuve de plus que les pratiques habituelles de l'école sont prévues pour les enfants déjà favorisés... et pas du tout pour les autres !

Seconde formule intéressante de notre collègue :
Je ne crois plus au constructivisme qui est une perte de temps inouïe pour un rendement médiocre. Je pense sincèrement que cela part d'un bon sentiment, d'une théorie liée à l'ancienne maïeutique, mais que c'est peu efficace.

Un grand merci pour le "bon sentiment", lequel, pourtant, n'a jamais participé, que je sache, à l'élaboration de cette théorie. Je pense sincèrement que notre collègue se moque ici. Et plus encore quand il associe la "maïeutique" au "constructivisme". Socrate a dû se retourner dans sa tombe !

Comme chacun sait, Socrate s'est servi ici du métier de sa mère (sage-femme de l'époque), pour dire que l'enseignant devait accoucher les esprits, comme sa mère accouchait les corps. Accoucher les esprits, cela implique que le savoir y est déjà.
Telle n'est point la pensée de ceux qui ont élaboré la théorie constructiviste.
Et ce, pour deux raisons principales :

1- le savoir n'est pas une réalité constituée (à ranger dans un socle, par exemple !). C'est une mise en relation, donc une construction, constamment remise en question. Il n'y a pas de savoirs tout fait, à engranger quelque part.

2- De nombreux travaux ont mis en évidence, que, dès sa naissance (et même avant) tout enfant a construit des savoirs, savoirs qui vont évoluer durant toute sa vie, sous l'action de son expérience, de l'éducation et des apprentissages qu'il reçoit. Si bien qu'un apprentissage ne commence en fait jamais, il continue et ne peut prendre, qu'en s'appuyant sur les savoirs antérieurs.
Apprendre, ce n'est pas combler des manques, c'est transformer des savoirs.. Apprendre, c'est vivre un conflit cognitif et le métier d'enseignant consiste à aider les élèves à le vivre de façon positive.

C'est la raison pour laquelle ce n'est pas un métier facile, et qu'il ne suffit pas de bien maîtriser des contenus, pour pouvoir les enseigner ! Apprendre de nouvelles choses, ça fait mal, toujours (que l'on ait cinq ans ou cinquante !), car cela implique que l'on casse quelques-unes des choses auxquelles on croyait.
Et, d'autre part, personne ne peut nier, (sauf à assumer une évidente mauvaise foi !) que les seuls savoirs que nous ayons, soient ceux que nous avons digérés, donc reconstruits, pour se les ajouter, et réinvestis dans des projets autres que ceux qui ont permis de les acquérir.
Trouver n'est rien, l'important, c'est de s'ajouter ce qu'on a trouvé, a dit un jour un grand philosophe...

Et lorsque notre collègue parle de "perte de temps", il me fait penser à l'apprenti jardinier qui tire sur les fleurs, parce qu'il n'a pas le temps d'attendre qu'elles poussent...
C'est tout de même curieux que l'on respecte le fonctionnement des fleurs, voire des animaux, et pas celui des enfants... !!
Faut-il rappeler à notre collègue et à tous ceux, parents ou enseignants, qui pensent comme lui, que l'enseignement, c'est un jeu à deux, et que les partenaires que sont nos élèves sont des personnes à part entière, qui ont le droit de dire NON ?
Cela veut dire qu'il faut compter avec eux...
Il est vrai, qu'aujourd'hui, l'exemple du mépris des partenaires (enfants ou non) est donné en haut lieu...