Depuis octobre 2007, date du premier billet, intitulé "Le discours de la méthode...de lecture", plus de trente billets ont été proposés sur ce sujet par notre blog : tous les aspects de la question ont été passés en revue : les méthodes utilisées, l'histoire de celles-ci, les démarches, la question des syllabes en français, ce qu'on appelle la compréhension, la relation oral/écrit, la méthode globale, le goût de lire, la différence "déchiffrer /lire", comment commencer son apprentissage, la durée nécessaire de celui-ci, les divers "outils" inventés pour le "faciliter", la dyslexie, la place du "code" dans le travail, la fameuse "fluence"...
Que peut-il rester à dire, sinon, comme disait André Gide, que "Tout est dit, mais comme personne n'écoute, il faut toujours recommencer" ?

Recommençons donc.
Mais, en choisissant les aspects les plus assurés des diverses recherches menées sur ce sujet depuis les années soixante dix, ceux que même les neurosciences, quand elles sont de bonne foi, ne peuvent contester.

1- L'élève de CP est un enfant de six ans, donc un être humain, qu'on ne saurait contraindre, ni gaver, ni dresser, sans le blesser gravement et dont il faut respecter le fonctionnement. Freinet rappelait sur ce point, qu'on ne tire pas sur les fleurs pour les faire pousser plus vite. Les enfants, c'est pareil.

2- Comme la plupart des apprentissages, ce qu'on appelle "lire" est une activité complexe, aux dimensions diverses, linguistiques, sociales, motrices, affectives et autres, ce qui rend extrêmement compliqué son enseignement. Mais les aborder séparément, dans le temps, comme on l'a toujours fait est une grave erreur : on n'apprend pas à nager en dehors de l'eau, même si cela paraît faciliter l'apprentissage ! Il importe donc de les aborder ensemble, et toujours en relation entre eux.

3- On ne peut apprendre qu'en s'appuyant sur ce qu'on sait déjà. Or, chaque enfant, quel que soit son âge, a des savoirs, dès sa naissance, et même avant celle-ci. C'est donc sur eux que le travail d'enseignement doit prendre appui. Ce qui rend impossible tout recours à des outils d'apprentissage, qui seraient les mêmes pour tous les enfants, d'une année sur l'autre et d'une région à une autre.

4- La conséquence évidente de ce qui précède est que l'ensemble de la démarche est à reconstruire chaque année, à partir des nouveaux savoirs-déjà là des enfants.

5- On ne peut apprendre une activité qu'en la pratiquant. On ne peut donc apprendre à lire qu'en lisant.

6- Lire n'est pas une activité abstraite : elle s'effectue sur des "objets" spécifiques (livres, journaux; catalogues affiches, poèmes etc.). On ne peut apprendre à lire que sur de tels objets, à condition qu'ils appartiennent à l'environnement des enfants.

7- Lire est une activité de communication à distance, indépendante de la communication directe orale, et qui utilise pour communiquer, des signes écrits, perçus visuellement. La lecture à haute voix est une activité orale, différente de la lecture proprement dite, qui consiste à communiquer oralement à d'autres sa propre lecture d'un texte écrit. La lecture, elle, est une activité visuelle, indépendante de la communication orale.

8- Lire, c'est comprendre ce qui est écrit. Et comprendre, ce n'est pas pouvoir répondre à des "questions de compréhension", mais c'est pouvoir réagir à ce qui est écrit, soit de manière affective (rire parce que c'est drôle, ou être ému à la lecture), soit de manière active, en répondant, et en agissant. Apprendre à le faire, appartient à l'apprentissage, dès les tout premiers débuts de celui-ci.

Toute démarche, quelle qu'elle soit, qui respecte chacun de ces principes, peut être certaine de ne pas blesser les enfants de cet âge, où ils sont très fragiles. Elle a donc de fortes chances d'être efficace.

On remarquera que les pratiques courantes d'enseignement, y compris celles qui sont imposées officiellement, n'en respectent aucune.
Cherchez l'erreur...