On sait ce que le Ministère — et une bonne partie des collègues — entend par les "fondamentaux". C'est le français, ie, la langue, et les maths, ie le raisonnement.
Ceci est nettement confirmé par les propos mêmes du Ministre, que je rappelle ici :

Le deuxième axe est l’accent mis sur les savoirs fondamentaux. Le socle de notre École est de garantir à tous nos élèves la maîtrise des savoirs fondamentaux, ces savoirs nécessaires pour aller vers le monde. La priorité continuera d’être donnée au français et aux mathématiques : dans les enseignements dispensés à nos élèves jusqu’à la fin de la sixième ; dans la formation de nos professeurs des écoles à travers la poursuite des plans français et mathématiques et le lancement l’année prochaine d’un plan maternelle ; dans l’évaluation enfin des acquis des élèves. (signé le ministre de l'Éducation Nationale)

Important, certes, mais, comme dirait Cyrano : "c'est un peu court, jeune homme !"
C'est surtout une vision rabougrie et biaisée de la question, un raisonnement qui fait l'impasse de beaucoup trop de choses, y compris de l'humain que sont élèves et enseignants
Finalement, qu'est-ce qui est "fondamental" ?
Si, au lieu de partir des types de savoirs, — du reste, infiniment discutables — on se met à penser que, sous ceux-ci, il y a des enfants — qui après nous vivront, dirait le poète — on découvre alors qu'on pose bien mal la question : ce sont les savoirs qui doivent s'adapter — Chevallard dit "transposer", pour s'adapter — aux possibilité d'apprentissage des élèves et non l'inverse.
Donc les questions à poser sont plutôt de cet ordre :
Qu'est-ce qui est important (fondamental), pour les élèves ? De quoi ont-ils besoin, pour grandir et devenir des adultes responsables, capables de gérer et de protéger notre système socio-politique, la démocratie, (enfin, qui s'en approche comme il peut), garant de la liberté de chacun ? Et cela correspond à quels types de savoirs ? Mais surtout, à quels types d'entrée dans le savoir ?

Quand on cherche les réponses à ces questions, on voit bien que la réponse "faire du français et des maths" est complètement hors sujet.
Ce qui compte, ici, ce sont eux, les enfants. Des êtres humains qui ont un corps et des besoins d'enfants n'ayant rien de commun avec les disciplines scolaires.
Et, pour eux, le "fondamental", c'est le bien-être de ce corps, le développement de la motricité qu'il permet, la possibilité de communiquer avec l'entourage, sous diverses formes, le développement solide des opérations de l'intelligence dont ils ont besoin (raisonnement, mémorisation, analyse, etc.), mais aussi la gestion du stress qui les envahit parfois, et des difficultés d'origines diverses, auxquelles ils se heurtent.
Il faut bien voir que cette autre manière de répondre, a d'autres conséquences : elle conduit à un autre regard sur les pratiques scolaires, qui fait découvrir à quel point, celles-ci vont souvent à l'encontre de ces besoins. Le travail individuel, et le stress qu'il génère pour beaucoup, avec la compétition entre élèves qu'il provoque, est contreproductif, en dépit de son omniprésence dans la majorité des classes.

Ce qui est fondamental, ce n'est pas de "faire du français et des maths".
Ce qui est fondamental, c'est de savoir qu'en classe, tout est fondamental : le climat de la classe, le bien-être des élèves, leur droit à la parole, à l'erreur, le respect mutuel qui unit élèves et enseignant et aussi élèves entre eux, les apprentissages qu'ils y font, ceux prévus par les programmes mais aussi ceux qui n'y sont pas.
En fait, le fondamental, ici, ce sont toutes les questions que le ministre n'a pas posées. Comment ces disciplines sont intégrées à la vie de la classe, comment leur présence est adaptée à l'âge des enfants, ce qui est mis dedans, et les valeurs qui doivent accompagner les savoirs.
Bref, tout ce qu'on appelle la Pédagogie... que le ministre semble avoir oubliée. Qu'il se rassure, hélas : il n'est pas le seul...

Désolée, monsieur le Ministre : le fondamental, ce n'est pas simple du tout !!