(1) On peut trouver le message dans le billet du 19 août, intitulé "Une rentrée de résistance".

1 La solution du problème.

En fait, les deux "phrases" proposées, sont la traduction mathématique des deux affirmations suivantes :
P1- la liste des entiers naturels est infinie (on pourra toujours trouver un nombre plus grand que n'importe quel autre nombre).
P2- la liste des entiers naturels est un ensemble fini (un nombre plus grand que tous les autres n'existe pas).

Comment en est-on arrivé à ce "sens" ? La question se pose doublement, car à première vue, cette réponse ne ressemble guère à ce que le déchiffrage a donné :
P1- quel que soit x, appartenant à l'ensemble des entiers naturels, il existe un y, appartenant à l'ensemble des entiers naturels, tel que y est plus grand que x.
P2- il existe un y, appartenant à l'ensemble des entiers naturels, tel que, quel que soit x appartenant à l'ensemble des entiers naturels, y est plus grand que x

Les phrases que donne le déchiffrage oralisé sont lourdes, encombrées de répétitions compliquées, d'où il n'est pas aisé de dégager une signification claire. Au contraire, la signification des solutions proposées ci-dessus est évidente : que s'est-il passé entre les deux réponses ? Ou, si l'on préfère qu'ont fait ceux qui ont compris tout de suite ?

2- Les moyens mis en œuvre pour trouver cela

D'abord, ceux qui ont compris n'ont pas commencé par prononcer à haute voix ce qui est écrit, mais ils ont commencé par OBSERVER le message : ce sont leurs yeux qui ont fonctionné. Ils ont examiné les données de ce problème, en recherchant des ressemblances, des constantes et des différences. Par exemple, ils se sont assuré que le "x" du début, comme le "y", sont bien les mêmes que ceux de la fin du message ; ils ont constaté également que des éléments sont semblables d'une phrase à l'autre, mais placés dans un ordre différent, ce qui laisse supposer que les deux phrases ne disent sans doute pas la même chose.
Ensuite, ils ont cherché à REFORMULER dans leur langage personnel les définitions proposée, pour chacun des signes : "un x appartenant à l'ensemble des entiers naturels", c'est tout simplement un nombre, et le "quel que soit" signifie "n'importe lequel". La lettre "x" désigne donc ici n'importe quel nombre.
Le signe "tel que", est un équivalent de "est" : c'est ce qu'on appelle une copule, qui relie les deux parties de la phrase.
On arrive à la traduction suivante de p1 : n'importe quel nombre pourra toujours être suivi d'un nombre supérieur à lui. C'est incontestable, puisque la liste des nombres est infinie.

Dès lors le sens de p2 est évident : elle affirme qu'il existe un nombre qui serait plus grand que tous les autres, ce qui est faux.

3- Ce qu'on peut en déduire, pour la lecture des petits qui apprennent à lire

* Que le déchiffrage oralisé d'un message ne peut pas conduire à sa compréhension, même si on l'accélère par une lecture fluide : la linéarité du pas à pas et la prononciation y font obstacle, en consommant une énergie qui n'est plus disponible pour les opérations de raisonnement, et en empêchant toute mise en relation des éléments du message.
* Qu'il faut au contraire observer d'abord l'ensemble du message pour formuler des hypothèses qui se révèlent indispensables pour ouvrir la porte de la compréhension en l'orientant dans une direction possible : c'est le fameux "horizon d'attentes", sans lequel la compréhension se fera très mal, voire pas du tout.
* Qu'il faut mettre en relation les éléments observés, à la fois entre eux, et avec ce qu'on sait par ailleurs, sans oublier ce qu'on cherche, puisqu'une lecture est toujours dirigée par un projet : ce sont donc des opérations de raisonnement par déduction et par inférence, qu'il faut mettre en œuvre.

4- Conclusion sur les rapports entre déchiffrage et compréhension

Il n'y en a aucun. L'activité de lecture n'a strictement rien de "mécanique". C'est une activité constamment intelligente, mettant en jeu des opérations de raisonnement qui n'ont rien de spontané et qui doivent faire l'objet d'un apprentissage précoce et approfondi.

Il reste à préciser de façon plus fine, quelles sont ces opérations, et comment les enseigner aux enfants. Ce sera, avec les questions de nos lecteurs, l'objet des prochains billets.
A suivre.