Le clou, c'est celui de la manière d'évaluer à l'école, celui qui dit redit et prouve qu'évaluer des élèves n'a rien à voir avec le fait d'estimer leur valeur marchande : on n'est pas dans l'émission "Affaire Conclue".
Le "marteau", c'est un ami venu d'un pays voisin, un grand de la pédagogie intelligente : c'est Charles Pépinster qui a la gentillesse de nous faire le cadeau de son travail sur ce point.
Il faut tout de même se réveiller sur les notes. En fait, mettre une note, c'est exactement coller sur l'élève une étiquette avec un prix. Du reste, il n'est pas rare d'entendre dans un conseil de classe, à propos d'un élève, des formules comme "Untel, il vaut douze, pas plus !".

La note n'apporte strictement aucune information valable sur le travail d'un élève, mais elle peut faire beaucoup de mal, qu'elle soit mauvaise ou non.
En revanche, la seule information qu'elle donne, c'est l'état affectif du correcteur, son degré de fatigue, d'énervement, ou son enthousiasme (plus rarement) devant la performance d'un élève. Tout enseignant, qui a eu des paquets de copies à corriger, sait bien à quel moment il faut qu'il arrête : c'est soit lorsqu'il vient de mettre 5/20 à trois copies de suite ; soit, comme c'était mon propre cas à l'époque, lorsque je découvrais que les quatre dernières copies avaient obtenu un 10,5/20 ! Question de tempérament : j'ai connu des collègues que la fatigue rendait mauvais ; pour ma part, c'était une indulgence molle et endormie qui s'imposait.

Evaluer, à l'école, c'est bien autre chose.
Et ce n'est même pas vérifier si mes élèves ont atteint l'objectif que je m'étais fixé : un objectif, en pédagogie, ce n'est pas un but à atteindre, c'est une DIRECTION. La tâche d'un enseignant, c'est d'accompagner les élèves dans leur avancée vers telle ou telle maîtrise ; et évaluer, c'est les aider à repérer où ils en sont dans cette avancée.
Ce sont les progrès qu'on évalue et pas autre chose . Et le travail consiste alors à réorganiser ensemble la suite du voyage, et la manière de marcher, pour arriver le plus près possible du but visé.
Et il n'y a aucune raison de mettre des notes.

Il faut donc les supprimer et les remplacer par un véritable évaluation. Voilà le clou à enfoncer.
Or, Charles a osé refaire pour son compte les expériences de docimologie qui avaient déjà prouvé, il y a quarante an et plus, l'inutilité nocive des notes en classe.
Voici son travail : je lui donne la parole.

Il est intéressant de savoir qu’en 25 ans d’animation d’ateliers de formation pédagogique en Belgique, France, Suisse, Luxembourg, Tunisie, ce ne sont pas seulement 37 correcteurs que j’ai consultés mais 1255. Ils ont tous eu, sous les yeux, la même page pleine d’erreurs orthographiques. Du tableau complet des notes accordées, allant de 20 à 0, j’extrais quelques constatations :

* 7 correcteurs ont attribué 19/20
* 46, ont mis 17/20
* Un groupe de six correcteurs a détecté 25 erreurs et a mis 12/20 .
* 110,lui ont attribué 15/20
* Un autre groupe en a trouvé aussi 25 mais a donné un…zéro.
* 132 ont mis la note 12/20
* Un groupe trouve 44 fautes et attribue 12,5/20
* Un autre pour 30 erreurs met 7/20.
* 144 ont mis 10/20
* 76 ont mis 8/20
* 42 ont mis 5/20
* 18 n'ont mis que 1/20
* 112 ont considéré que ça ne valait pas plus de 0/20
* 1 prof a mis -15/20 (!!)
(Ceci dément les experts qui accordent du crédit aux notes concertées).
NB : Une lecture attentive du texte (identique pour tous donc) permettait de trouver 42 erreurs, selon moi.


Alors ? Qu'en dites-vous ?